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L’immigration et la puissance de l’Amérique dans le monde

THE GOLDEN DOOR WAS LOCKED
A pier near Fort Clinton at Battery Park, New York City. Photo: Astro Zhang Yu/flickr

CAMBRIDGE – Les USA sont une nation d’immigrés. A l’exception d’un petit nombre d’Amérindiens, tout le monde est originaire d’ailleurs, et même les immigrés récents peuvent accéder aux plus hautes fonctions politiques et économiques. L’expression de Roosevelt s’adressant aux Filles de la Révolution américaine comme à ses “compagnes immigrées” est restée célèbre (Les Filles de la Révolution américaine est une association qui se vante de ce que les ancêtres de ses membres comptaient parmi les premiers arrivants sur le Nouveau continent).

Néanmoins, depuis quelques années, se développe un climat hostile à l’immigration, au point que cette question a joué un rôle important dans la bataille pour la désignation du candidat républicain. Mais la réélection d’Obama montre la force électorale des Latino-américains qui ont rejeté Mitt Romney à une majorité de 75%, de même que les Américains d’origine asiatique.

C’est pourquoi quelques républicains de renom demandent maintenant à leur parti de reconsidérer sa position anti-immigration, tandis que la réforme de l’immigration est inscrite dans l’agenda politique d’Obama. Ce sera une étape importante pour empêcher le déclin de l’Amérique.

Les craintes que suscite l’immigration quant à son impact sur les valeurs nationales et sur l’identité américaine ne sont pas nouvelles. Au 19° siècle, le mouvement des Know Nothing était fondé sur l’opposition aux immigrés, en particulier irlandais. L’immigration chinoise a été suspendue à partir de 1882 et la loi sur l’immigration de 1924 a freiné l’immigration pendant 40 ans.

Les USA ont connu un taux record de résidents nés à l’étranger en 1910 : 14,7%. Un siècle plus tard, d’après le recensement de 2010, ce taux était de 13%. Bien qu’ils constituent une nation d’immigrés, de plus en plus d’Américains sont critiques à l’égard de l’immigration. Les sondages montrent qu’une grande partie de l’opinion publique souhaite qu’elle diminue. La récession a renforcé ce point de vue : 50% des Américains étaient favorables à une diminution de l’immigration en 2009, contre 39% en 2008.

L’opinion publique s’inquiète des conséquences sur la culture américaine du nombre d’immigrés et de leur origine. Selon les projections, en 2050 les Blancs non hispaniques ne seront que très faiblement majoritaires. Les Hispaniques constitueront 25% de la population américaine, les Afro-Américains 14% et les Asiatiques 8%.

Mais la communication de masse et les forces du marché constituent des motivations fortes pour maîtriser l’anglais et accepter un certain degré d’assimilation. Les médias modernes aident davantage les immigrés à connaître leur nouveau pays avant qu’ils ne s’y rendent que ce n’était le cas il y a un siècle. Il semble que l’assimilation des derniers immigrés est au moins aussi rapide que celle de leurs prédécesseurs.

Si une immigration trop importante peut engendrer des problèmes sociaux, à long terme l’immigration renforce la puissance des USA. D’après les estimations, au moins 83 pays et territoires ont un taux de fertilité insuffisant pour assurer le renouvellement de leur population. Alors que la plupart des pays développés seront de plus en plus confrontés à un manque de main d’œuvre, l’Amérique est l’un des quelques pays qui puisse éviter la baisse de sa population et de son poids démographique dans le monde.

Ainsi, pour ne pas voir sa population décliner, le Japon devrait accepter 350 000 nouveaux arrivants chaque année durant les cinq prochaines décennies, ce qui est difficile pour un pays historiquement hostile à l’immigration. Par contre, l’Institut américain des statistiques [Census Bureau] indique que la population américaine devrait augmenter de 49% au cours des quatre prochaines décennies.

Aujourd’hui, les USA sont le troisième pays le plus peuplé de la planète (après la Chine et l’Inde) et ce sera probablement encore le cas dans 50 ans, ce qui n’est pas sans conséquence sur le plan économique : presque tous les autres pays développés seront confrontés au fardeau croissant d’une population vieillissante – fardeau qui pourrait être allégé aux USA grâce à l’immigration.

Par ailleurs, bien que des études montrent que l’immigration apporte peu de bénéfices à court terme et que les employés non qualifiés risquent de souffrir de la concurrence des nouveaux arrivants, l’apport des immigrés disposant des qualifications voulues pourrait être des plus utile dans plusieurs secteurs et favoriser la croissance à long terme. Il existe une forte corrélation entre le nombre de visas accordés à des demandeurs disposant d’une qualification et le nombre de brevets accordés aux USA. Au début de ce siècle, ce sont des ingénieurs nés en Inde ou en Chine qui faisaient tourner le quart des entreprises de haute technologie de la Silicon Valley (avec un chiffre d’affaire de 17,8 milliards de dollars). Entre 1995 et 2005, un quart des start-up du secteur technique aux USA a été lancé grâce au concours d’immigrés. Ce sont des immigrés ou des enfants d’immigrés qui sont à l’origine de 40% des 500 premières entreprises du classement réalisé par le magazine Fortune en 2010.

L’apport de l’immigration compte également pour le rayonnement des USA. Le fait que beaucoup de gens veulent y venir et la réussite des immigrés les rendent encore plus attractifs. Les USA agissent comme un aimant et beaucoup de gens envisagent de s’y installer, notamment parce qu’ils voient la réussite de nombre d’Américains qui leur ressemblent. Par ailleurs, les relations entre les immigrés et leurs familles et amis restés dans leur pays d’origine favorisent une information exacte et positive sur les USA.

De la même manière, la présence d’un grand nombre de cultures accroît les contacts avec d’autres pays, ce qui favorise l’ouverture d’esprit des Américains sur le monde à l’ère de la mondialisation. L’immigration renforce la puissance économique et le rayonnement des USA.

Selon Lee Kwan Yew, l’ancien dirigeant de Singapour qui est un observateur avisé à la fois des USA et de la Chine, cette dernière ne dépassera pas les USA en tant que première puissance mondiale du 21° siècle, précisément parce que le Nouveau continent attire les meilleurs éléments et les plus brillants du reste du monde et les fond dans une culture variée, riche de créativité. La Chine peut quant à elle puiser dans une population bien plus nombreuse, mais il estime qu’étant repliée sur sa propre culture, elle est moins créative que les USA.

C’est un point de vue que les Américains devraient prendre à cœur. Si Obama parvient à faire adopter sa réforme de l’immigration, il aura fait un grand pas en avant pour remplir sa promesse de maintenir la puissance des USA.

Traduit de l’anglais par Patrice Horovitz
Copyright Project Syndicate

Joseph S. Nye est professeur à Harvard. Il a écrit un livre intitulé The Future of Power.

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Migration: Creating Networks for Business, Politics and Growth

From Brain Drain to Brain Flow

Greasing the Wheels of the Labor Market? Immigration and Worker Mobility


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Immigration and American Power

THE GOLDEN DOOR WAS LOCKED
A pier near Fort Clinton at Battery Park, New York City. Photo: Astro Zhang Yu/flickr

CAMBRIDGE – The United States is a nation of immigrants. Except for a small number of Native Americans, everyone is originally from somewhere else, and even recent immigrants can rise to top economic and political roles. President Franklin Roosevelt once famously addressed the Daughters of the American Revolution – a group that prided itself on the early arrival of its ancestors – as “fellow immigrants.”

In recent years, however, US politics has had a strong anti-immigration slant, and the issue played an important role in the Republican Party’s presidential nomination battle in 2012. But Barack Obama’s re-election demonstrated the electoral power of Latino voters, who rejected Republican presidential candidate Mitt Romney by a 3-1 majority, as did Asian-Americans.

As a result, several prominent Republican politicians are now urging their party to reconsider its anti-immigration policies, and plans for immigration reform will be on the agenda at the beginning of Obama’s second term. Successful reform will be an important step in preventing the decline of American power.

El incierto mapa futuro del mundo árabe

Tahrir Flags
Tahrir Flags. Photo: AK Rockefeller/flickr.

MADRID – Las revoluciones que atravesaron el mundo árabe en los dos últimos años expusieron la extraordinaria fragilidad de importantes estados árabes. Con la excepción de algunos países con raíces históricas, como Egipto o Marruecos, la mayoría de los estados árabes son construcciones artificiales del colonialismo europeo, que combinó tribus y etnias diversas para formar estados unitarios cuya cohesión solo fue posible gracias por la presencia de gobiernos autoritarios y un enemigo común: el sionismo y sus protectores occidentales.

Pero la actual conmoción que sacude a estos países ya no obedece a un resentimiento contra las fuerzas extranjeras, sino que señala el inicio de una segunda fase en el proceso de descolonización: tribus y pueblos que solamente el yugo de un dictador mantuvo unidos ahora reclaman para sí el derecho a la autodeterminación. Incluso no es demasiado aventurado afirmar que viejos estados árabes artificiales se desintegrarán y que de sus escombros surgirán otros nuevos. La invasión estadounidense de Irak dio la pauta, al quitarle poder al gobierno central y conferírselo a diversos enclaves étnicos y religiosos.

Lo sucedido en Yugoslavia, un producto mal concebido de la diplomacia de tiempos de Wilson, puede suceder también en las creaciones imperiales, más cínicas, de Oriente Próximo. Lo que Sigmund Freud definió como “el narcisismo de las pequeñas diferencias” llevó a que, a continuación de la contienda más sangrienta que hubo en Europa desde la Segunda Guerra Mundial, Yugoslavia se dividiera en siete pequeños estados (incluido Kosovo). ¿Espera a los estados árabes el mismo destino?

La democratización del mundo árabe no es solamente cuestión de derrocar a dictadores, también tiene que ver con la renovación del mapa político‑étnico de la región, que para muchos grupos minoritarios ha sido insatisfactorio.

Un ejemplo de esto son los kurdos, repartidos entre Irak, Turquía, Siria e Irán, pero no son ellos los únicos. Libia se creó a partir de tres ex colonias italianas, Tripolitania, Cirenaica y Fezán, cada una de las cuales incluía en su territorio diferentes confederaciones tribales (los sa’adi en Cirenaica, lossaff al bahar en Tripolitania y los tuaregs en Fezán). La caída de Muamar el Gadafi abrió la caja de Pandora de las viejas rivalidades, y Cirenaica se convirtió en una región semiautónoma llamada Barqa.

Del mismo modo, las viejas tensiones entre la minoría gobernante suní en Bahréin y la mayoría shií se agravaron después de que en 2011 el gobierno aplastó el movimiento shiita prodemocracia. En Jordania, en tiempos de estabilidad ya era bastante difícil mantener el precario equilibrio entre la mayoría palestina y la minoría beduina, ahora es peor.

Otros estados de la región han estado siempre al borde de la desintegración desde el principio. Yemen nació en 1990 a partir de la reunificación de Yemen del Sur y Yemen del Norte, países que en 1972 y 1979 se enfrentaron en guerras despiadadas. Pero los líderes del nuevo país nunca lograron que las diversas tribus, unidades básicas de la estructura social yemení, se integraran al sistema político y aceptaran inequívocamente la autoridad del estado soberano.

Por su parte, Siria es un ejemplo elocuente de cómo la lucha contra un dictador puede convertirse en poco tiempo en una contienda sectaria en pos de la supervivencia o el dominio. A pesar de que ahora la Coalición Nacional de Fuerzas Revolucionarias y Opositoras Sirias cuenta con legitimidad internacional, un derrumbe caótico del régimen todavía puede provocar la división del país en enclaves étnicos autónomos. Los rebeldes, en su mayoría suníes que cuentan con el apoyo de grupos yihadistas como el Frente Nusra (una vertiente de Al Qaeda en Irak) nunca hicieron un intento genuino de acercarse a las minorías del país (cristianos, shiitas, drusos y kurdos), que acusaron a la Coalición Nacional de “obedecer a Turquía y Qatar”.

Los kurdos, sometidos al yugo de árabes, turcos e iraníes, vieron en la caída del régimen de Saddam Hussein en Irak (y el actual desmembramiento de otras autocracias árabes) una oportunidad de sumarse al nuevo Gran Juego de Oriente Próximo. Es decir, hacer realidad el sueño de unir a su nación dispersa para crear un estado kurdo independiente.

Las milicias kurdas del norte de Siria trataron de mantenerse fuera de la guerra civil mientras preparaban su propio enclave autónomo para una eventual caída del régimen de Bashar Al Assad, pero ahora se ven forzadas a unirse a los combates, y es probable que los próximos en seguir sus pasos sean los kurdos iraquíes (quienes dieron entrenamiento a sus pares sirios). Para Turquía, el activismo kurdo en el norte de Siria (dirigido por el partido Unión Democrática, rama del insurgente Partido de los Trabajadores del Kurdistán en Turquía) no puede ser más que una amenaza directa a su estabilidad; por eso, hará todo lo posible por evitar que dicho activismo incite la rebelión de la inquieta minoría kurda en Turquía.

Líbano es otro collage étnico que no puede mantenerse inmune a lo que suceda en Siria. Ya se ven signos de contagio en los enfrentamientos entre milicias sunitas y alauitas. Por más hegemónico que parezca Hizbulá, su poder en Líbano depende en gran medida del apoyo del régimen de Assad. Si este se cae y la oposición suní toma el poder, el nuevo equilibrio de poderes en Siria transformará inevitablemente el equilibrio de poderes en Líbano.

En 2011, después de una larga guerra civil, el estado mayoritariamente cristiano de Sudán del Sur se separó del estado árabe musulmán del norte. Tal vez su caso sirva de modelo para lo que acontecerá con otros estados árabes sin historia y desgarrados por rivalidades étnicas y tribales. Como se dice que dijo el ex primer ministro de China, Zhou Enlai, en relación con los efectos de la Revolución Francesa: “Es demasiado pronto para saber”. Pero es evidente que el statu quo poscolonial en Oriente Próximo se cae a pedazos. Esta multifacética región todavía debe cristalizar en construcciones políticas más definitivas.

Traducción: Esteban Flamini

Copyright Project Syndicate

Shlomo Ben Ami, ex ministro israelí de Asuntos Exteriores, es vicepresidente del Centro Internacional de Toledo para la Paz y autor del libro Cicatrices de guerra, heridas de paz: la tragedia árabe-israelí.
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دول عدم اليقين العربي

Tahrir Flags
Tahrir Flags. Photo: AK Rockefeller/flickr.

مدريد ــ كانت الثورات التي اجتاحت العالم العربي على مدى العامين الماضيين سبباً في الكشف عن الهشاشة غير العادية التي تتسم بها دول عربية رئيسية. إن أغلب الدول العربية، باستثناء دول تاريخية مثل مصر أو المغرب، عبارة عن تراكيب مصطنعة افتعلها الاستعمار الأوروبي، الذي جمع بين قبائل ومجموعات عِرقية متباينة متغايرة في دول موحدة مركزية لا يمكن الحفاظ على تماسكها إلا من خلال الحكم الاستبدادي وفي ظل وجود عدو مشترك ــ الصهيونية وأنصارها في الغرب.

بيد أن اضطرابات اليوم لم يعد يحركها غضب موجه نحو قوى أجنبية؛ بل إنها في واقع الأمر تمثل مرحلة ثانية من عملية إنهاء الاستعمار: التأكيد على حق تقرير المصير من قِبَل الشعوب والقبائل التي لا يوحدها سوى نير الحاكم المستبد. والواقع أنه ليس من المستبعد تماماً أن نتوقع ظهور دول عربية جديدة من تحت أنقاض الدول القديمة المصطنعة. ولقد ساعد الغزو الأميركي للعراق في تحديد النمط، فكسر سلطة الحكومة المركزية وعمل على تمكين جيوب عرقية ودينية.

وما حدث في يوغوسلافيا، المنتج الملفق غير المدروس لدبلوماسية وودرو ويلسون، قد يحدث في الصنائع الاستعمارية الأشد سوءاً في الشرق الأوسط. كان ما أطلق عليه سيجموند فرويد وصف “نرجسية الاختلافات الطفيفة” سبباً في تقسيم يوغوسلافيا إلى سبع دول صغيرة (بما في ذلك كوسوفو) في أعقاب الاقتتال الأشد عنفاً ودموية في أوروبا منذ الحرب العالمية الثانية. فهل تتمكن الدول العربية من تجنب مصير مماثل؟

إن ترسيخ الديمقراطية في العالم العربي لا يتوقف على الإطاحة بالطغاة فحسب؛ بل إن الأمر يدور أيضاً حول تصحيح الخريطة السياسية العِرقية للمنطقة، والتي أسهمت في الإبقاء على العديد من الأقليات في حالة متواصلة من السخط والاستياء. ومن بين الأمثلة الواضحة هنا حالة الأكراد، الذين انقسموا بين العراق وتركيا وسوريا وإيران.

ولكن الأكراد ليسوا وحدهم في هذا بكل تأكيد. فقد تم إنشاء ليبيا من ثلاث مستعمرات إيطالية سابقة، طرابلس، وبرقة، وفزان، وكل منها كانت في الأساس تتألف من اتحادات كونفدرالية قَبَلية مختلفة (قبائل السعادي في برقة، وقبائل صف البحر في طرابلس، وقبائل الطوارق في فزان). وبسقوط معمر القذافي انفتح باب من أبواب جحيم الخصومات القديمة، مع تحول برقة إلى إقليم يتمتع بحكم شبه ذاتي.

وعلى نحو مماثل، تفاقمت حدة التوترات القديمة بين الأقلية السُنّية الحاكمة والأغلبية الشيعية في البحرين منذ سحق الحركة المنادية بالديمقراطية تحت قيادة الشيعة في عام 2011. وفي الأردن، كان الحفاظ على التوازن الهش بين الأغلبية الفلسطينية والأقلية البدوية صعباً بالقدر الكافي في الأوقات المستقرة؛ والآن أصبحت المهمة أشد صعوبة من أي وقت مضى.

وكانت دول أخرى في المنطقة تتأرجح على حافة الفشل منذ البداية. فقد نشأت دولة اليمن في عام 1990 بعد إعادة توحيد شطري اليمن الجنوبي والشمالي، بعد حروب مريرة في عام 1972 وعام 1979. ولكن زعماء اليمن لم يتمكنوا قط من دمج وتوحيد القبائل، الوحدات الأساسية للبنية الاجتماعية في اليمن، في النظام السياسي على النحو الذي قد يساعد في توليد قبولها الواضح لسيادة الدولة.

وتُعَد حالة سوريا مثالاً قوياً للكيفية التي قد يتحول بها الكفاح ضد حاكم مستبد إلى صراع طائفي من أجل البقاء أو فرض السيطرة. فعلى الرغم من الشرعية الدولية التي يتمتع بها المجلس الوطني السوري لتحالف القوى الثورية والمعارضة، فإن الانهيار الفوضوي غير المنضبط للنظام قد يقود البلاد إلى الانقسام إلى جيوب عرقية مستقلة. والواقع أن الثوار، وأغلبهم من السُنّة الذين تعاونهم جماعات جهادية مثل جبهة النُصرة، وهي فرع من تنظيم القاعدة في العراق، لم يحاولوا جادين قَط التواصل مع الأقليات في البلاد ــ المسيحيين، والشيعة، الدروز، والأكراد ــ والتي تبرأت من المجلس الوطني باعتباره “مطيعاً لتركيا وقطر”.

أما الأكراد، الرازحين تحت نير العرب ولأتراك والإيرانيين، فقد رأوا في زوال نظام صدّام حسين في العراق ــ كما يرون الآن في تقطيع أوصال الأنظمة الاستبدادية العربية الأخرى ــ فرصة للانضمام إلى لعبة الشرق الأوسط الكبير الجديدة. وهذا يعني تحقيق حلم لم شمل أمتهم المشتتة في دولة كردية مستقلة.

والآن بدأت مليشيات الأكراد في شمال سوريا، والتي كانت حريصة على البقاء بعيداً عن الحرب الأهلية بينما تستعد لإنشاء جيب مستقل خاص بها في حالة سقوط نظام بشّار الأسد، بدأت تنجر إلى الاقتتال؛ وقد يتبعهم أكراد العراق، الذين دربوا أقاربهم السوريين. ومن المؤكد أن تركيا تنظر إلى نشاط الأكراد في شمال سوريا ــ تحت زعامة حزب الاتحاد الديمقراطي، وهو أحد فروع حزب العمال الكردستاني المتمرد في تركيا ــ باعتباره تهديداً مباشراً لاستقرارها، وسوف تبذل قصارى جهدها لمنعه من إشعال شرارة الثورة بين الأقلية الكردية المتوترة بشكل خاص في تركيا.

ويُعَد لبنان مثالاً آخر لنسيج عرقي مزخرف لا يمكن تحصينه ضد الأحداث الجارية في سوريا. وبالفعل، بات بوسعنا أن نرى علامات التأثر غير المباشر بالأوضاع في سوريا في الاشتباكات بين السُنّة والمليشيات العلوية. ورغم ما يبديه حزب الله الآن من هيمنة، فإن قوته في لبنان تعتمد إلى حد كبير على الدعم الذي يستمده من نظام الأسد. وإذا سقط الأسد، وصعدت المعارضة تحت قيادة السُنّة إلى السلطة، فمن المحتم أن يعمل توازن القوى الجديد في سوريا على إعادة صياغة توازن القوى في لبنان.

تُرى هل تتحول جنوب السودان، الدولة ذات الأغلبية المسيحية التي انفصلت في عام 2011 عن الشمال العربي المسلم بعد حرب أهلية طويلة، إلى نموذج جديد للدول العربية غير التاريخية التي تعصف بها الخصومات العرقية والقَبَلية؟ ذات يوم قال رئيس وزراء الصين السابق تشو إن لاي عن تأثير الثورة الفرنسية: “من المبكر للغاية أن نجزم”. ولكن لا أحد يستطيع أن يشكك في أن الوضع الراهن في مرحلة ما بعد الاستعمار في الشرق الأوسط يترنح. والآن ما علينا إلا أن ننتظر تبلور هذه المنطقة المعقدة المتعددة الأوجه في بنية سياسية نهائية واضحة.

ترجمة: أمين علي          Translated by: Amin Ali

Copyright Project Syndicate

شلومو بن عامي وزير خارجية إسرائيل الأسبق، ونائب رئيس مركز توليدو الدولي للسلام، ومؤلف كتاب “ندوب الحرب وجراح السلام: المأساة الإسرائيلية العربية”.
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Incertitudes arabes

Tahrir Flags
Tahrir Flags. Photo: AK Rockefeller/flickr.

MADRID – Les révolutions qui ont balayé le monde arabe lors des deux dernières années ont mis en lumière l’extraordinaire fragilité de certains pays arabes parmi les plus importants. A l’exception de pays anciens comme l’Egypte ou le Maroc, la plupart des pays arabes sont des constructions du colonialisme européen qui a réuni des tribus et des ethnies disparates dans des Etats artificiels dont l’unité reposait uniquement sur un régime autoritaire et un ennemi commun (le sionisme et ses protecteurs occidentaux).

Les désordres auxquels on assiste aujourd’hui dans les pays arabes ne sont pas dus à une colère dirigée contre des forces étrangères, ils marquent la deuxième phase du processus de décolonisation : l’affirmation du droit à l’autodétermination de peuples et de tribus unis exclusivement par le joug d’un dictateur. Il n’est donc pas difficile d’anticiper l’émergence de nouveaux pays qui se construiraient sur les débris des anciens pays arabes. L’invasion américaine de l’Irak en constitue un modèle, car elle a fait tomber le pouvoir du gouvernement central et l’a transféré à des enclaves ethniques et religieuses.

Ce qui s’est passé en Yougoslavie, une conséquence de la diplomatie wilsonienne, pourrait aussi se produire au Moyen-Orient dans un contexte marqué par bien plus de cynisme. Ce que Freud définissait comme “le narcissisme des différences mineures” a entraîné l’éclatement de la Yougoslavie en 7 petits Etats (y compris le Kosovo), après les combats les plus sanglants que l’Europe ait connu depuis la Deuxième Guerre mondiale. Les pays arabes pourront-ils éviter le même sort ?

La démocratisation dans le monde arabe n’est pas seulement une question de renversement de dictatures, elle passe aussi par le redécoupage de la carte ethno-politique de la région, qui n’est pas approprié à la situation de nombreuses minorités. C’est le cas des Kurdes qui se répartissent entre l’Irak, la Turquie, la Syrie et l’Iran.

Mais il n’y a pas que les Kurdes. La Libye est formée de trois anciennes colonies italiennes : la Tripolitaine, la Cyrénaïque et le Fezzan, chacune incluant des groupes de tribus différents (par exemple les Sa’adi en Tripolitaine et les Touaregs au Fezzan). La chute de Kadhafi a ouvert la boite de Pandore des anciennes rivalités, la Cyrénaïque se transformant en région semi-autonome connue sous le nom de Barqa.

De la même manière, à Bahreïn, les tensions de longue date entre la minorité sunnite au pouvoir et la majorité chiite se sont aggravées depuis l’écrasement du mouvement pro-démocratique conduit par les chiites en 2011. En Jordanie, l’équilibre précaire entre la majorité palestinienne et la minorité bédouine qui n’était déjà pas facile à maintenir lorsque la situation était stable, est devenu problématique aujourd’hui.

D’autres pays de la région se sont trouvés dés le début au bord de l’effondrement. Le Yémen est issu de la réunification en 1990 du Yémen du Sud et du Yémen du Nord qui se sont combattus sans merci en 1972 et en 1979. Mais ses dirigeants n’ont pas pu intégrer les tribus (unités de base de la structure sociale yéménite) dans un système politique, de manière à ce qu’elles reconnaissent sans équivoque le Yémen comme un Etat souverain.

La Syrie montre de manière éclatante comment un combat contre la dictature peut rapidement se transformer en lutte sectaire pour la survie ou pour le pouvoir. Malgré la légitimité internationale dont jouit maintenant la Coalition nationale des Forces de la Révolution et de l’Opposition syrienne, un effondrement désordonné du régime pourrait conduire à des divisions entre les différentes enclaves ethniques autonomes du pays. Les rebelles, en majorité des sunnites aidés par des groupes jihadistes comme le Front Al-Nusra, une branche de Al Qaïda en Irak, n’ont jamais vraiment essayé de nouer des contacts avec les minorités du pays (les chrétiens, les chiites, les Druzes et les Kurdes) qui refusent de rejoindre la Coalition nationale qu’ils considèrent sous l’emprise de la Turquie et du Qatar.

Les Kurdes, sous le joug des Arabes, des Turcs et des Iraniens, ont vu dans le renversement de Saddam Hussein et maintenant dans le démembrement d’autres autocraties arabes  l’occasion de participer au nouveau Grand redécoupage du Moyen-Orient – autrement dit, réaliser leur rêve d’union au sein d’un Etat kurde indépendant.

Les milices kurdes du nord de la Syrie qui cherchaient à rester en dehors de la guerre civile tout en préparant leur propre enclave autonome en cas de renversement du régime de Bachar Al Assad, sont maintenant poussées dans les combats. Les Kurdes d’Irak qui les entraînaient pourraient suivre la même voie. La Turquie considère évidemment l’activisme kurde au nord de la Syrie (sous la direction du parti d’Union démocratique, une branche du Parti des travailleurs du Kurdistan insurgé en Turquie) comme une menace à l’encontre de sa stabilité. Elle fera donc tout ce qu’elle peut pour empêcher la rébellion de s’étendre à sa propre minorité kurde qui supporte mal son autorité.

Le Liban constitue encore une autre mosaïque ethnique sensible aux événements en Syrie. Déjà les affrontements entre milices sunnites et alaouites montrent que les combats débordent la frontière syrienne. Cependant, aussi hégémonique semble aujourd’hui le pouvoir du Hezbollah au Liban, il tient en grande partie au soutien du régime de Assad. Si celui-ci tombe et que l’opposition constituée essentiellement de sunnites dirige la Syrie, l’équilibre des pouvoirs aura des conséquences sur les rapports de force au Liban.

Considérons le Soudan du Sud, pays à large majorité chrétienne, devenu indépendant en 2011 en se détachant du nord du Soudan, musulman et arabe, à l’issue d’une longue guerre civile. Deviendra-t-il le nouveau paradigme pour des Etats arabes de création relativement récente, déchirés par des rivalités ethniques et tribales ? Ainsi que l’ancien Premier ministre chinois Chou En-Lai l’aurait déclaré au sujet de l’impact de la Révolution française, “Il est trop tôt pour l’évaluer”. Mais il ne fait aucun doute que le statu quo post-colonial est en train de s’écrouler au Moyen-Orient. Cette région en patchwork doit encore se recristalliser en une construction politique durable.

Traduit de l’anglais par Patrice Horovitz

Copyright Project Syndicate

Shlomo Ben-Ami, ancien ministre des Affaires étrangères d’Israël, est vice-président du Toledo International Centre for Peace. Il est l’auteur d’un livre intitulé Scars of War, Wounds of Peace : The Israeli-Arab Tragedy [Cicatrises de guerre, blessures de paix : la tragédie israélo-arabe].
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